Quelles procédures internes les MNP doivent-ils mettre en place pour recevoir et traiter les plaintes ?
Il est important d’élaborer des lignes directrices et des procédures claires sur les modalités de réception et de traitement des plaintes. Lorsque le MNP fait partie d'une institution plus large, il est recommandé d’élaborer ces lignes directrices en coordination avec le reste de l'institution.
Les MNP peuvent être amenés à prendre en compte et à préciser les aspects suivants :
Organisation interne : La plupart des institutions de médiation et des commissions nationales des droits de l'homme désignées comme MNP disposent d'un service chargé des plaintes ou des enquêtes ; ce type de service est une structure distincte du MNP qui est dotée d'un personnel et d'un système d’archivage spécifiquement affectés à cette tâche. Afin de créer des synergies, le MNP et le service chargé des plaintes ou des enquêtes peuvent se réunir régulièrement et partager une base de données commune sur les plaintes. Les institutions spécialisées créées pour s’acquitter uniquement du mandat de MNP peuvent décider de désigner un point focal ou de créer une unité spécifique chargée du traitement des plaintes.
Réception, analyse et classification des plaintes : Lorsqu’ils élaborent leurs lignes directrices, les MNP doivent définir clairement les modalités de réception de ces plaintes. Les MNP doivent également décider du mode d'accusé de réception, en particulier en cas de plainte adressée par écrit. Les MNP peuvent être amenés à préciser qui, au sein de l'équipe, est responsable de l'enregistrement, du classement et du suivi des plaintes. Il peut être utile de déterminer les critères de classement des plaintes et d’identifier les mesures qui doivent être prises (par exemple, en fonction de la gravité ou de l’urgence de la plainte) ; cela est notamment le cas pour les MNP qui ne font pas partie d’institutions plus larges habilitées à traiter les plaintes individuelles.
Enregistrement et catégorisation des plaintes : Afin de permettre aux MNP d'identifier des pratiques généralisées et de pouvoir s’appuyer sur les plaintes dans leur travail de prévention, il est important d'enregistrer correctement toutes les plaintes reçues. Quel que soit l'outil choisi, il est utile de consigner les informations suivantes dès la réception d’une plainte :
- Type de plainte
- Nom de la personne / des personnes concernées (le cas échéant)
- Thème de la plainte
- Institution faisant l’objet de la plainte
- Mesures prises par le MNP en réponse à la plainte
Les MNP peuvent également consigner des informations sur la suite donnée aux plaintes les plus pertinentes.
Confidentialité, consentement et protection des données : Les MNP doivent protéger les personnes avec lesquelles ils ont été en contact (par écrit ou au cours d'entretiens) et cela constitue une priorité absolue (conformément au principe « ne pas nuire »).
À cet égard, les MNP ont une obligation de confidentialité consacrée par l’article 21 de l’OPCAT et confirmée dans un Avis du SPT ; celui-ci précise que les données à caractère personnel ne doivent pas être publiées sans le consentement exprès et éclairé de la personne concernée. Cette obligation fixe une règle générale. Toutefois, dans des circonstances exceptionnelles, le principe « ne pas nuire » peut conduire les MNP à examiner attentivement la nécessité éventuelle de partager certaines informations personnelles recueillies dans le cadre de leur travail avec d'autres organes responsables et indépendants (tels que les services médicaux ou le Parquet), et ce même en l’absence de consentement de la personne concernée.
Ces circonstances exceptionnelles peuvent inclure des situations indiquant des cas de torture ou d'autres violations graves des droits humains dans lesquelles le fait de demander le consentement des détenu∙e∙s augmenterait le risque de représailles à leur encontre ; ou une situation dans laquelle un individu n'est pas en mesure de donner un consentement exprès et éclairé. En pareil cas, le MNP doit tout mettre en œuvre pour recueillir et utiliser des informations concordantes provenant d'autres sources que les détenu∙e∙s, telles que les témoignages de membres du personnel et d’autres documents.
Les MNP doivent également prendre des mesures pour protéger les informations sensibles en leur possession, par exemple en les stockant dans un logiciel sécurisé ou dans des armoires et des bureaux verrouillés.
Protection contre les représailles : Les MNP doivent s'efforcer de prendre des mesures pour prévenir les représailles éventuelles contre des personnes détenues. Ces mesures peuvent consister, par exemple, à s’entretenir avec un groupe important de personnes privées de liberté afin de faire en sorte que le personnel chargé de la surveillance ne puisse pas être en mesure d'identifier les détenu∙e∙s interrogé∙e∙s ; à examiner un grand nombre de dossiers individuels et ; à effectuer des visites de suivi pour s’assurer que les personnes qui ont communiqué des informations au MNP ne sont pas l’objet de représailles.
En fonction de la nature du problème et des individus qui dirigent le lieu de détention, le MNP peut également envisager d'informer directement la direction, tout en respectant la confidentialité des sources, par exemple, en faisant référence de manière générale à des indices de harcèlement de la part de membres du personnel envers des détenu∙e∙s. Si le MNP estime que la situation d'une personne privée de liberté est particulièrement inquiétante, il peut également décider de laisser ses coordonnées aux détenu∙e∙s.