Thaïlande : Réflexion sur la loi anti-torture, un an après son adoption

(Thai version below)

Aujourd'hui - 22 février 2024 - marque le premier anniversaire de l'entrée en vigueur en Thaïlande de la loi sur la prévention et la répression de la torture et des disparitions forcées B.E. 2565 (la loi anti-torture).

L'adoption de cette loi a constitué une étape importante pour le pays dans la mise en œuvre de ses obligations au titre de la Convention des Nations unies contre la torture (UNCAT).

"Un an plus tard, nous pouvons constater à quel point cette loi a contribué à modifier les actions et les attitudes en Thaïlande", a déclaré Barbara Bernath, secrétaire générale de l'APT.

Sur la scène internationale, la Thaïlande a retiré les déclarations interprétatives des articles 1 (définition de la torture), 4 (criminalisation de la torture) et 15 (compétence en matière de torture) de l'UNCAT.

Au niveau national, la nouvelle loi a contribué à galvaniser l'engagement du pays en faveur de la prévention et de la lutte contre la torture. Une affaire récente impliquant un homme qui a avoué le meurtre de sa femme, prétendument sous la contrainte des forces de l'ordre thaïlandaises, a mis en lumière la question des interrogatoires fondés sur des aveux et le recours à la torture.

Alors que la Thaïlande réfléchit aux progrès réalisés au cours des douze derniers mois dans la mise en œuvre de sa loi anti-torture, il convient de poursuivre les efforts visant à garantir la sécurité et les droits des personnes en détention.

Barbara Bernath, secrétaire générale de l'APT

Selon les médias, le corps d'une femme a été retrouvé dans un étang à Aranyaphrathet, en Thaïlande, le 12 janvier 2024. Le mari de la femme a été rapidement arrêté par la police et a reconnu le crime le jour même. Cependant, des journalistes d'investigation ont découvert une autre histoire. Les images de vidéosurveillance de la région ont montré cinq adolescents en train de commettre le meurtre et de se débarrasser du corps dans l'étang. L'un des adolescents était le fils d'un officier de police.

Le mari de la femme a par la suite affirmé que la coercition - y compris le déshabillage forcé, l'enchaînement des chevilles et la menace d'étouffement avec un sac en plastique - avait été utilisée pendant son interrogatoire.

En réponse à l'allégation de l'homme, le département thaïlandais des enquêtes spéciales (DSI) a réagi rapidement et a pu utiliser le mandat spécial prévu par la loi anti-torture.

M. Angsuket Visuthvatanasak, directeur du Bureau des affaires d'application de la justice au sein du DSI, a déclaré à l'APT que le DSI se coordonnerait avec les autorités compétentes pour garantir la transparence des procédures judiciaires à l'encontre des officiers de police, conformément à la loi anti-torture.

Pour compléter la législation thaïlandaise contre la torture, il est clair qu'il reste nécessaire de mettre pleinement en œuvre les garanties juridiques et procédurales pendant la garde à vue, comme le prévoient les Principes relatifs à l'efficacité des entretiens aux fins d'enquête et de collecte d'informations, également connus sous le nom de Principes de Méndez.

Il s'agit notamment d'abandonner les méthodes d'interrogatoire coercitives au profit d'entretiens d'investigation, de mettre en œuvre l'enregistrement audio et vidéo des interrogatoires et de mettre en place un système de surveillance des lieux de détention.

La Thaïlande s'est jointe à plus de 60 autres États à l'Assemblée générale des Nations unies pour exprimer son soutien aux principes Méndez.

Ces dernières années, l'APT a travaillé avec les autorités thaïlandaises pour renforcer les connaissances et les capacités en matière de prévention de la torture, notamment en organisant des ateliers sur les principes Méndez avec l'Académie des cadets de la police royale (RPCA) et d'autres forces de l'ordre.

S'appuyant sur cette collaboration, le lieutenant-colonel Kiattisak Chanjana de la RPCA a souligné l'engagement de l'institution à développer un programme de formation aux entretiens de police aligné sur les obligations de la loi anti-torture, soulignant l'importance pour les nouvelles recrues d'adopter une approche qui s'oppose strictement à l'utilisation de la torture dans les pratiques d'enquête.

En mars, l'APT organisera un atelier de formation des formateurs, en collaboration avec la RCPA et la police néo-zélandaise, axé sur les entretiens basés sur les rapports.

En outre, l'APT a récemment organisé un dialogue national en Thaïlande sur la ratification du Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies contre la torture (OPCAT) qui, entre autres, crée un système de visites régulières et annoncées dans les lieux de détention, y compris les commissariats de police.

Le dialogue national - organisé le 9 février 2024, en partenariat avec le Département de protection des droits et libertés de Thaïlande et le HCDH - a rassemblé des représentants de plus de 26 institutions gouvernementales différentes.

L'APT a également collaboré avec la Commission nationale des droits de l'homme de Thaïlande, en organisant des sessions pour approfondir la compréhension des principes de l'OPCAT et de la méthodologie de suivi.

"Notre travail avec les autorités thaïlandaises et les forces de l'ordre a mis en lumière le désir sincère de nombreux acteurs de procéder à des changements pratiques dans le système de justice pénale du pays. L'APT continuera à soutenir les efforts de la Thaïlande afin que chaque personne puisse être en sécurité en détention", a déclaré Mme Bernath.