'Lorsque j'étais Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la Torture, j'ai observé que le cadre le plus fréquent où la torture et la coercition ont lieu est l'interrogatoire des suspects, dans le but d'obtenir des aveux' dit Juan E. Méndez, dans l'avant-propos des Principes. Pour y remédier, dans son dernier rapport à l'Assemblée Générale de l'ONU en 2016, Juan E. Méndez a appelé à l'adoption de nouvelles lignes directrices pour remplacer les interrogatoires coercitifs par des entretiens fondés sur le rapport et la mise en œuvre de garanties.
Après près de quatre ans d'un processus de rédaction mené par des expert-e-s, l'Association pour la Prévention de la Torture (APT), la ‘Anti-Torture Initiative’ (ATI) et le ‘Norwegian Centre for Human Rights’ (NCHR) ont le plaisir de dévoiler les "Principes relatifs à l'efficacité des entretiens pour les enquêtes et la collecte d'informations", que nous appelons les "Principes Méndez".
Ces nouveaux principes visent à transformer la relation entre les États et leurs citoyen-ne-s. Ils sont destinés à modifier la manière dont les autorités publiques mènent les entretiens et, par conséquent, à améliorer la confiance dans l'État. Fondés sur la science, le droit et l'éthique, les Principes proposent une alternative concrète aux méthodes d'interrogatoire qui reposent sur la coercition pour obtenir des aveux. Ils fournissent des orientations pour obtenir des informations précises et fiables dans le plein respect des droits humains et de la dignité de chacun-e, notamment par la mise en œuvre de garanties judiciaires et procédurales dans les premières heures de la garde à vue.
Ces principes ont été rédigés par un Comité directeur composé de 15 femmes et hommes de différentes régions et de différents domaines d'expertise tels que les entretiens, la police, les droits humains, la psychologie ou le renseignement. Mark Thomson, ancien secrétaire général de l'APT, a rejoint Juan Méndez pour coprésider cette initiative.
Ce qui rend ce document unique est qu'il rassemble des conseils sur la conduite d'entretiens non coercitifs et fondés sur le rapport, avec la mise en œuvre effective de garanties judiciaires et procédurales tout au long du processus de l'entretien, dès le premier contact avec les autorités. Il a été constaté que les garanties, dans les premières heures de la garde à vue, jouent un rôle crucial dans la réduction des risques de torture et autres mauvais traitements..
Ces six principes vont des fondements d'un entretien efficace, ancrés dans la science, le droit et l'éthique, à l'offre de conseils sur la pratique de l'entretien – y compris pour les personnes en situation de vulnérabilité –, à la formation, la responsabilité et la mise en œuvre. Ils ont pour but d'inciter les décideurs à prendre les mesures nécessaires pour examiner et réformer les pratiques d'entretiens au sein de leur juridiction.
L'APT a soutenu le processus depuis son lancement et, avec l'ATI et le NCHR, a facilité les réunions du Comité directeur. L'APT a également contribué à la rédaction et à l'édition des Principes.
La finalisation des principes relatifs à l'efficacité des entretiens* représente une étape importante. Ils contribueront à modifier les pratiques policières dans le monde entier en réduisant, dans le même temps, la torture et les mauvais traitements et en garantissant de meilleurs résultats pour les enquêtes. La présomption d'innocence sera respectée et la justice rendue, ce qui rendra les sociétés plus sûres pour tou-te-s", s'est félicitée Barbara Bernath, secrétaire générale de l'APT.
Elle a ajouté que "l'APT va maintenant soutenir les efforts de mise en œuvre par les États et s'engager dans le plaidoyer pour leur assentiment par les Nations Unies".
L'Assemblée Générale des Nations unies, le Conseil des droits de l'Homme de l’ONU, le Congrès sur la Prévention du Crime de l'ONUDC et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits humains ont déjà salué cette initiative
*Veuillez noter que la liste des contributeurs peut encore faire l'objet de modifications dans les semaines à venir.