Au cours du mois qui a marqué le 10e anniversaire des Règles de Bangkok, le Brésil a marqué une avancée pour les droits des adolescentes privées de liberté au Brésil. Lors de sa session du 17 décembre 2020, le Conseil National pour les Droits des Enfants et des Adolescents (CONANDA), un organe de délibération et de gestion composé de représentant.e.s du gouvernement et de la société civile, a approuvé une Résolution qui présente des lignes directrices pour la prise en charge des adolescentes dans le système socio-éducatif. Nous n’avons pas d’informations supplémentaires concernant d’autres pays où cette attention spécifique pour les adolescents est standardisée.
L'adoption de cette Résolution offre un cadre pour garantir et protéger les droits des adolescentes privés de liberté. Elle répond à un ensemble de demandes identifiées et cherche à contribuer au Système National d'Assistance Socio-Éducative (SINASE); un système qui intègre le cadre normatif national et international pour garantir les droits des adolescents institutionnalisés.
La résolution reconnaît les spécificités des besoins et des droits des adolescentes privés de liberté, ainsi que les situations de vulnérabilité et de risque auxquelles elles sont souvent exposées. Le mécanisme de prévention (MNP) brésilien a consigné dans ses rapports d'inspection, entre autres: des insultes et traitements dégradants basés sur le genre et la race, le manque d'articles et d'hygiène de base, la suspension des visites familiales comme sanction disciplinaire, la garde d'adolescentes par des agents socio-éducatifs masculins.
Cependant, depuis que le vote sur le projet de Résolution traitant des lignes directrices pour l'assistance aux adolescentes privées de liberté dans le SINASE a été annoncé comme l'ordre du jour de la 292ème Assemblée Ordinaire de la CONANDA (s’étant tenue du 15 au 17 décembre 2020), le gouvernement a commencé à divulguer de fausses informations sur le contenu et l'objectif du texte. Après l’adoption de la résolution par le Collège, par 14 voix en faveur et 9 contre, CONANDA et les conseillers de la société civile ont subi des attaques dans les médias et sur les réseaux sociaux, créant de la désinformation et de la dissension. La lutte pour la publication de cette Résolution est donc maintenant un combat à mener pour renforcer la CONANDA.
Le projet de cette Résolution a été élaboré conjointement par un groupe de travail formé de représentants du MNP, du Comité National pour la Prévention et la lutte contre la Torture et de CONANDA, puis ouvert à une consultation publique à laquelle ont participé des représentant.e.s d'institutions et des professionnel.le.s qui travaillent dans le domaine de l'enfance et assurent le suivi de l'éducation sociale.
Cette Résolution, qui considère également les Règles de Bangkok comme les paramètres directeurs pour la prise en charge des adolescentes, offre au Brésil le statut d’un des pays ayant la réglementation la plus avancée dans le domaine de l'enfance et de l'adolescence.
Parmi les garanties et les nouveautés de cette résolution, on trouve notamment: des actions visant à prévenir et à combattre la violence physique et sexuelle, l’interdiction de la garde directe des adolescentes par des agents socio-éducatifs, ainsi que des mesures de protection visant à éviter tout type de représailles contre les adolescentes qui portent plainte pour violence sexuelle et/ou physique, y compris au travers d'ordres d'éloignement préventifs des agents public accusés, et l’interdiction de toute activité dans une unité socio-éducative qui nécessite un contact direct avec des adolescentes. Des actions sont également prévues pour lutter contre le racisme institutionnel, en tenant compte des interfaces de discrimination multiple qui se produisent, surtout, en ce qui concerne les adolescentes noires. La résolution considère également la problématique de la santé mentale et la prévention du suicide, entre autres.
L'établissement de directives nationales pour la politique d'assistance aux adolescentes privées de liberté permettra d’orienter non seulement pour les responsables des Unités socio-éducatives, mais aussi pour les institutions du Système de Garantie des Droits des Enfants et des Adolescents, en fonction des compétences de chacun de ses organes.
Dans ce contexte, il est nécessaire de souligner que, comme d'autres acquis en matière de droits, cette Résolution est née d'un processus d'identification des besoin, de systématisation des données et de propositions d'actions pour faire face aux situations de vulnérabilité ; il convient également de rappeler que les droits ne s’acquièrent pas toujours dans un réalité politique consensuelle. Ainsi, la participation sociale a toujours été et reste fondamentale pour le processus démocratique et la lutte pour les droits.
Par conséquent, nous avons bel et bien de quoi nous réjouir, parce que cette Résolution adoptée représente un jalon dans le processus permanent de garantir et d'élargir les droits. Il est essentiel en ce moment que toutes les institutions nationales et internationales engagées dans la promotion et la garantie des droits humains soient attentives au suivi du processus interne de cette résolution, qui ne se terminera qu'après sa publication. En attendant, faisons preuve de solidarité, soutenons la CONANDA, cet organe fondamental pour l'élaboration et l'inspection des politiques pour l'enfance et l'adolescence au Brésil.
Adriana Raquel Ferreira Costa Oliveira, MNP Brésil
Travailleuse social, expert du Mécanisme National de Prévention et de lutte contre la Torture, Brésil. Spécialiste en psychologie sociale, par l'UFMA, spécialiste des droits humains, par l'UCB, étudiante en master de politique sociale, à l'UnB.